Du projet de loi sur la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, ce blog en a souvent parlé, et dernièrement, lors de son examen au Sénat.
Le texte reviendra à l’Assemblée Nationale en discussion publique le 15 mars 2016. Du 1er au 9 mars, il a été examiné par la Commission de développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée Nationale. Parmi les modifications apportées sont à citer deux de celles intervenues le 7 mars 2016.
- La notion de changement d’utilisation qui nécessitera une nouvelle APA
……l’amendement CD530 de Mme Danielle Auroi.
Mme Danielle Auroi. Cet amendement propose de revenir à la rédaction initiale du texte en substituant au critère de changement d’activité celui de changement d’objectifs et de contenu. M. Jérôme Bignon, rapporteur du texte au Sénat, a souligné à juste titre combien cette modification introduite par ses collègues de droite allait vider ce dispositif de toute portée.
Supposons que, après avoir mené une étude reposant sur la pharmacopée des populations locales d’un territoire d’outre-mer, un institut de recherche dépose avant la date d’entrée en vigueur de cette loi un premier brevet sur l’utilisation d’une molécule active d’une plante connue pour ses vertus médicinales – anticancéreuses, par exemple. L’institut de recherche déciderait par la suite d’exploiter cette molécule pour la commercialisation d’un autre médicament. Il s’agirait bien du même domaine d’activité, celui de la recherche médicale, de la même ressource génétique et de la même étude de savoirs traditionnels des populations locales, mais l’utilisation différerait et ne serait plus soumise au dispositif d’APA. En outre, la procédure est simplement déclarative, la demande d’autorisation ne s’avérant nécessaire que pour la poursuite d’un objectif de développement commercial. La première rédaction est nettement plus claire et nous devrions la rétablir.
Mme la rapporteure. Je suis favorable au retour au texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture et donc à l’adoption de cet amendement.
Mme la secrétaire d’État. Je ne souhaite pas revenir sur un amendement voté par le Sénat pour lequel le Gouvernement avait émis un avis favorable. La rédaction du Sénat s’avère plus simple et moins sujette à interprétation, si bien que je suis opposée à l’adoption de cet amendement.
La Commission adopte l’amendement.
- Le montant maximal de la contribution financière à payer par les utilisateurs
……ensuite les deux amendements identiques CD533 de Mme Danielle Auroi et CD736 de la rapporteure.
Mme Danielle Auroi. Cet amendement vise à revenir à la rédaction initiale du Gouvernement, qui prévoyait que les contributions financières susceptibles d’être versées par les utilisateurs ne pouvaient dépasser un plafond à 5 % du chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes réalisé et des autres revenus. Les sénateurs l’ont ramené à 1 %. En outre, le taux de 5 % auquel nous souhaitons revenir est modulable puisque le pourcentage retenu peut être inférieur.
Mme la secrétaire d’État. Je suis favorable à ces amendements.
M. Michel Heinrich. La position de la secrétaire d’État est étonnante puisque contraire à celle de Ségolène Royal au Sénat, qui estimait le taux de 1 % raisonnable, ajoutant : « Le Gouvernement tient compte du débat démocratique et prend en considération les bonnes idées qui émergent. Nous faisons un travail de coconstruction législative, notre objectif commun étant l’amélioration du texte. » Pour le reste, le taux initial de 5 % est vraiment prohibitif, d’autant que vous décidez de taxer le chiffre d’affaires et non le bénéfice net.
M. Gérard Menuel. On s’écarte complètement de la real économy : un taux de 5 %, vous ne vous rendez pas compte !
Mme la rapporteure. Il s’agit d’un plafond.
M. Gérard Menuel. Peut-être, mais il n’empêche que même 1 % du chiffre d’affaires, c’est déjà énorme pour des entreprises qui vont faire 0,5 % ou 1 % voire 2 % de résultat – citez-moi des entreprises qui réalisent 5 à 10 % de résultat au niveau mondial !
Mme la secrétaire d’État. Le Gouvernement avait en effet entendu un certain nombre d’arguments au Sénat. Mais nous entendons également ceux de votre rapporteure : elle ne propose rien d’autre que d’en revenir à une proposition initiale du Gouvernement qui, très « realpolitiquement » parlant, s’alignait sur la pratique de l’Australie, pays comparable à la France en matière de biodiversité et de développement économique.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte ces amendements.