Modifier le texte de son brevet, des exemples en sont fournis régulièrement sur ce blog par des décisions sur la limitation du brevet, plus rares sont celles qui concernent la modification de la description du brevet.
L’arrêt de la Cour de Paris du 7 octobre 2016 qui annule un brevet pour extension de la demande initiale et également intéressant en ce que le brevet en cause est un brevet délivré par l’OEB.
- Lors de la procédure d’examen devant l’OEB, le déposant modifie la revendication 1ère et la description
Considérant qu’il est établi qu’au cours de la procédure devant l’Office européen des brevets (OEB), l’examinateur a estimé, dans une notification datée du 16 janvier 2004 (pièce 21 de l’appelante) et en invoquant l’invention divulguée par un brevet Valmet WO98/3830 publié le 03 septembre 1998, que la demande « ne répond pas aux exigences de l’article 52(1) de la CBE parce que l’objet des revendications 1-3 n’est pas nouveau au sens de l’article 54(1) et (2) de la CBE », ajoutant que « les revendications dépendantes 4-7 ne semblent pas présenter de caractéristiques supplémentaires (… « bien connues » grâce à deux demandes de brevet Valmet ‘), conjuguées à une revendication à laquelle elles se rapportent (…) » ;
Qu’il est constant que la société P…… a alors procédé à une modification de la revendication principale de la demande de brevet telle qu’initialement déposée [selon les ajouts figurant ci-avant dans la reprise des termes de cette revendication] ;
Qu’elle a, ce faisant, ajouté au § 4 page 5 (lignes 18 à 24) de la description figurant dans la demande initiale (pièces 14 et 14bis de l’appelante) et qui était ainsi rédigé :
« Plus spécifiquement, chaque ensemble de connexion (22) comprend deux couples d’éléments (16) situés sur les côtés opposés du pilier (15) et de la barre (21), et chacun est défini par deux éléments parallèles (16) s’étendant dans un sens sensiblement horizontal. Chaque élément possède une extrémité (16a) s’articulant sur le pilier (15) et une extrémité (16b) s’articulant sur la barre (21). »
le membre de phrase suivant (pièce 2 de l’appelante, page 5 § 4, lignes 25 à 28) :
« autour d’axes horizontaux respectifs (A,B) qui sont perpendiculaires au parcours de déplacement (P) des câbles (2,3) » ;
- Ce qu’en dit la Cour
Que l’ajout à la description des éléments de tiges (16) s’articulant sur la barre (21) du membre de phrase suivant: « autour d’axes horizontaux respectifs (A, B) qui sont perpendiculaires au parcours de déplacement (P) des câbles (2,3) » (page 5, lignes 25 à 27 de la description) et, par ailleurs, l’ajout à la dernière partie du préambule de la revendication 1 du membre de phrase suivant : « le long d’un parcours de déplacement sensiblement horizontal (P) et » se seraient pas imposés si la description initiale avait été porteuse de ces éléments ; que l’homme du métier pouvait fort bien considérer que ces caractéristiques ne faisant pas l’objet d’une description dans le brevet initial, à laquelle ne pouvait suppléer la présentation d’un dessin, n’étaient pas nécessaires à la réalisation de l’invention ;
Que l’intimée relève aussi qu’il ressort de la lettre en réponse du conseil turinois en propriété industrielle de la société appelante, L……., adressée le 26 mai 2004 à l’examinateur de l’OEB (pièces 7 et 7bis) qu’est évoqué le fait que le parallélisme des axes d’articulation et du sens de défilement des toiles produit une force de cisaillement nuisible à leur résistance et que « la configuration de la présente invention telle que revendiquée permet d’obtenir une valeur beaucoup plus stable et contrôlable de la pression exercée par la racle d’égouttage sur la toile et donc de la qualité du papier » ; qu’elle en conclut justement que la nouvelle revendication est de nature à apporter une contribution technique à l’invention et qu’il ne s’agit pas seulement d’une simple reformulation du problème technique et de sa solution, déductibles du contenu global de la demande telle que déposée ;
Qu’il se déduit de ce qui précède que la revendication telle que modifiée au cours de la période d’examen devant l’OEB ne peut être considérée comme supportée par la description du brevet initial à laquelle les dessins, à les supposer-même dépourvus d’ambiguïté, ne peuvent se substituer ; que l’objet de la demande s’étend donc au delà du contenu de la demande, au sens de l’article 123 CBE, et que doit être confirmé le jugement en ce qu’il prononce la nullité de cette revendication 1 de la partie française du brevet en cause ;
Bonjour et merci pour cet article instructif et fort bien détaillé.