Les faits à l’origine de cette affaire ont été indiqués sur ce blog à propos de l’arrêt de la Cour de Paris du 23 septembre 2014, ici, et rappelés à l’occasion de l’arrêt de la Cour de Justice du 7 juillet 2016, ici aussi.
La Cour de Paris par son arrêt du 26 septembre 2017 va-t-elle clôturer cette affaire ?
Ne sont repris ci-après que les développements de la Cour consécutifs à l’arrêt de la Cour de Justice.
- Le rappel de la position de Genentech
Sur le troisième moyen d’annulation tiré de la violation de l’ordre public international (article 1520, 5° du code de procédure civile):
Genentech soutient que l’exécution des sentences qui l’obligent à payer des redevances à Hoechst pour un activateur qu’il ne contrefait pas, ainsi que cela a été jugé par les tribunaux américains, qu’il n’utilise pas, et que ses concurrents peuvent employer librement, viole de manière effective et concrète le droit européen de la concurrence, tel qu’il résulte des décisions de la Commission européenne, des règlements de l’Union européenne, des lignes directrices concernant l’application de l’article 81 du Traité CE (devenu l’article 101 TFUE) relatif aux accords de transfert de technologie, ainsi que de la jurisprudence de la CJUE.
- Un élément factuel important est relevé par la Cour de Paris
Considérant, en premier lieu que, contrairement à ce que prétend Genentech, la sentence la condamne à payer les redevances courantes pour l’utilisation effective de l’activateur HCMV dans la production du Rituxan, et non pas pour une simple ‘option d’emploi’ de cette technologie;
- Le rappel de la réponse de la Cour de justice
Considérant, en second lieu, que, saisie d’ une question préjudicielle de cette cour dans la présente affaire, la CJUE a dit pour droit dans son arrêt du 7 juillet 2016 :
‘L’article 101 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce que, au titre d’un accord de licence tel que celui en cause au principal, il soit imposé au licencié de payer une redevance pour l’utilisation d’une technologie brevetée pendant toute la période d’effectivité de cet accord, en cas d’annulation ou de non-contrefaçon du brevet sous licence, dès lors que le licencié a pu librement résilier ledit accord moyennant un préavis raisonnable.’
- La Cour de Paris vérifie la possibilité effective de résilier la licence et de contester la validité des droits accordés sous celle-ci
Considérant qu’en l’espèce, d’une part, le licencié disposait d’une entière liberté de contester les droits attachés aux brevets sous licence, ainsi qu’en témoignent les actions engagées aux États-Unis, d’autre part, en vertu de l’article 8.3 de l’accord de licence, il pouvait mettre fin aux relations contractuelles à tout moment avec un préavis de deux mois, ce qu’il a d’ailleurs fait dès que Hoechst l’a interrogé sur l’utilisation des technologies sous licence;
Considérant que, contrairement à ce que soutient Genentech, de la circonstance que Hoechst n’ait demandé des comptes concernant le Rituxan, que onze ans après la mise sur le marché de ce produit et que la licenciée n’ait pas eu la faculté d’obtenir une ‘résiliation rétroactive’ du contrat, il ne résulte aucune restriction à la liberté de mettre fin au contrat à tout moment;
Considérant que l‘intérêt que Genentech avait de conserver à sa disposition l’activateur HCMV soit pour produire d’autres médicaments que le Rituxan, soit pour effectuer des recherches ne caractérise pas davantage une entrave à sa liberté de résilier;
Considérant qu’il n’est donc pas démontré que la reconnaissance ou l’exécution des sentences violerait de manière manifeste, effective et concrète l’ordre public international ; que le troisième moyen d’annulation doit être écarté;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les recours en annulation des sentences et de l’addendum doivent être rejetés;