En Europe, la lutte contre la pandémie se caractérise par d’importants financements publics sans mise en œuvre de licence d’office dans l’intérêt de la santé publique. La proposition de loi déposée début avril au Sénat relance le débat sur l’opportunité de cet outil issu du droit des brevets.
Face à une pandémie mondiale, la vaccination a deux objectifs : éviter les formes graves si ce n’est même mortelles des conséquences du virus, ralentir si ce n’est empêcher les variants ou pire encore les mutations du virus. Rappelons en effet, que de nouvelles souches virales pourraient remettre en cause les vaccinations déjà entreprises et les formulations des vaccins actuels, tristes horizons avec leur cortège de nouveaux travaux de recherche et de développement, et de nouvelles procédures d’autorisation de mise sur le marché, autant d’aléas qui reporteraient la sortie de crise.
Dans cette perspective de vaccination mondiale quelle place accorder à la proposition de loi du 8 avril 2021 « autorisant l’octroi de licence d’office de brevet dans l’intérêt de la santé publique en cas d’extrême urgence sanitaire » présentée par Monsieur le Sénateur Le Gleut[1] ? Permet-elle de faire passer le droit collectif à la sécurité pour tous avant les monopoles commerciaux de quelques-uns[2] ? La licence d’office existe déjà en droit français, après une tentative infructueuse de rapprochement avec le titulaire du brevet, sur avis du Ministre de la santé, le Ministre des finances par arrêté ouvre la possibilité à des tiers d’obtenir une licence non exclusive, dont le montant de la redevance est fixé d’un commun accord, et à défaut par décision judiciaire[3]. Même si aucune licence d’office n’a jamais été mis en œuvre en France, l’Etat a priori reste étranger aux flux financiers, il n’encaisse pas le montant de la redevance qui est versé directement par le bénéficiaire de la licence d’office au breveté, Hormis son intervention réglementaire, aucun coût financier n’est supporté par l’Etat. On le pressent, le mécanisme de la licence d’office tranche par rapport aux importants concours financiers apportés par les gouvernements en faveur des laboratoires depuis le début 2020. Comment les Etats auraient-ils pu manquer cet outil si économe des deniers publics ?
[1] Sénat n° 524, proposition enregistrée à la Présidence du Sénat le 8 avril 2021
[2] Tribune signée par un collectif d’anciens chefs d’Etats et de gouvernements, et des lauréats du prix Nobel, Libération, du 15 avril 2021, « Président Joe Biden, faites des vaccins contre le Covid-19 un bien commun »
[3] Voir en ce sens L613-17, l’article L613-16 prévoit au minimum un délai de 2 mois entre les premières consultations et la notification au breveté pour ses observations