Le secret, tout le monde en parle, le Conseil Constitutionnel vient de se prononcer sur le secret des journalistes, celui de leurs sources. Là
La Cour de cassation par son arrêt du 3 novembre 2016, confronte le legal privilege, le secret des affaires, le secret professionnel, le secret de l’avocat à la saisie de l’article 145 du Code de procédure civile. L‘arrêt du 3 novembre 2016
- Très brièvement les faits et la procédure
M…….. et T……… ont eu une filiale commune : MN..
M……. , une société nord- américaine, reproche à T………. d’avoir détourné à son profit les brevets MN…. et entend engager un procès contre différentes sociétés T…… dont deux sont françaises et une est nord-américaine.
M…….. présente une requête article 145 devant le Président du Tribunal de commerce de Nanterre et l’obtient.
La lecture de l’arrêt apprend que les pièces « appréhendées ne l’ont été que sur un ordinateur portable appartenant à un dirigeant de T………. » .
L’arrêt de la Cour de Versailles soumis au pourvoi a rejeté les demandes en rétractation des sociétés T……… et ordonné comme le demandait M………. la communication des pièces.
- La question des correspondances saisies
Parmi les pièces appréhendées par l’huissier, des « correspondances de conseils internes et externes soumis au droit américain, travaillant aux Etats-Unis pour des sociétés américaines », ..« protégées par un privilège de confidentialité résultant de la loi américaine sous l’empire de laquelle elles ont été échangées »
Le pourvoi soutient que « l’appréhension des documents litigieux constituait une violation des règles d’ordre public de droit américain instaurant un secret professionnel et un privilège de confidentialité », …., « le droit américain applicable à la protection du privilège de confidentialité tel qu’énoncé notamment par le Restatement (third) of the Law Governing Lawyers §119 (2000) »
- Que dit la Cour de cassation pour rejeter le pourvoi
Tout d’abord, il n’y a pas dans les correspondances saisies de courriers échangés entre un avocat et son client ni entre des avocats
« la cour d’appel a relevé que la mesure d’instruction sollicitée s’analysait en une mesure de constatation prévue par les articles 249 et suivants du même code, en tant que telle légalement admissible, dès lors qu’elle ne portait atteinte ni au principe de proportionnalité, ce qui n’était pas soutenu, ni aux libertés fondamentales, parmi lesquelles figuraient les règles internes de protection de la confidentialité des correspondances échangées entre le client et son avocat ainsi qu’entre l’avocat et ses confrères, les documents litigieux ayant été échangés entre des juristes n’ayant pas la qualité d’avocat au regard du droit français ; qu’elle a ainsi légalement justifié sa décision de ce chef »
Ni le secret des affaires ni le secret professionnel – autre que celui de l’avocat – ne s’opposent à l’application de l’article 145
« Attendu, en second lieu, que l’arrêt énonce que le secret des affaires et le secret professionnel ne constituent pas en eux-mêmes un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile et relève que la seule réserve à la communication des documents séquestrés tient au respect du secret des correspondances entre avocats ou entre un avocat et son client édicté par l’article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, de sorte que rien ne s’oppose pour le surplus à la demande présentée par la société M…….. ; que par ces énonciations et appréciations, la cour d’appel a pu statuer comme elle l’a fait, donnant leur efficacité immédiate aux mesures initialement ordonnées, qui permettent à cette société de recueillir les éléments de preuve et d’en tirer parti avant tout procès ;