Pour connaître la situation en France des CCP à durée négative ou nulle, reportons-nous à l’arrêt de la Cour de Paris du 28 janvier 2011
La chronologie des événements donnerait-elle une explication à la situation actuelle où l’INPI sursoit à la délivrance de tels CCP ?
- 22 mai 1997 : dépôt de la demande européenne du brevet « Conjugués de l’Interferon » dont la société Hoffmann La Roche est aujourd’hui titulaire.
- 22 juin 2002 : délivrance d’une autorisation communautaire de mise sur le marché pour un médicament qui, pour la société Hoffman La Roche, est couvert par les revendications 1 à 5 et 6 du brevet.
- 26 septembre 2003 : dépôt de la demande de certificat complémentaire de protection. (Notons qu’à cette date, c’est le règlement 1768/92 qui s’applique avant les modifications introduites par le règlement sur le certificat pédiatrique).
- La demande est ultérieurement modifiée par l’indication que la première AMM est celle obtenue le 5 juillet 2001, c’est-à-dire à une date antérieure à celle du 5ème anniversaire de la demande de brevet.
- 19 octobre 2009 : l’INPI accorde le CCP sur la base de cette AMM avec comme date d’expiration du certificat le 7 juillet 2016.
- La société demande alors à l’INPI de rectifier cette date.
- 8 janvier 2010 : l’INPI prononce le retrait du CCP motifs pris << Qu’aucune protection complémentaire ne peut donc être accordée au brevet invoqué sur la base de l’AMM visée, de sorte que le Certificat complémentaire de protection est sans objet >> ;
- 8 avril 2010 : recours de la société qui demande à la Cour de Paris de surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la CJUE dans l’affaire Merck.
Effectivement, la Cour de Paris va ordonner le sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt dans cette affaire C125/10.
Notons, toutefois, la position de l’INPI. A lire l’arrêt du 28 janvier 2011, l’office indique que « la procédure d’examen de la demande de certificat complémentaire de protection est actuellement en cours, mais qu’il a décidé de suspendre la procédure de délivrance dans l’attente de la décision de la Cour de Justice de l’Union Européenne, en sorte qu’il n’y aurait pas lieu à surseoir à statuer »
Déclaration pour le moins contradictoire, au regard de la décision intervenue le 8 janvier. D’ailleurs, la décision indique que la société requérante n’a pas eu connaissance de cette suspension.
En d’autres termes, il est probable que l’examen des demandes de CCP à durée négative ou nulle présentées devant l’INPI soient toutes suspendues, qu’elles aient été déposées avant ou après la prise d’effet du règlement pédiatrique.
Relevons enfin, que l’intérêt du débat sur le CCP à durée négative ou nulle est apparu avec le règlement 1901/2006 accordant 6 mois de protection en plus, quand la 1ère AMM dans la communauté ou dans les Etats associés est délivrée dans les 6 mois qui ont précédé le 5ème anniversaire.
Or, la décision de l’INPI du19 octobre 2009 a accordé un CCP au regard d’une première AMM remontant plus de 10 mois avant ce 5ème anniversaire, en donnant une protection se terminant le 7 juillet 2016, c’est-à-dire plus de 10 mois également avant le terme du brevet.
On voit ainsi que l’INPI était initialement favorable au CCP à durée négative, mais pour que la totalité du décompte négatif s’applique, d’où le recours de la société qui, sans doute, aurait préféré un CCP à durée nulle.
Se mesure ici toute la pertinence des conclusions de l’avocat général qui ont rappelé que la problématique n’était pas seulement celle posée par le juge allemand « Des médicaments peuvent-ils faire l’objet de la délivrance d’un Certificat complémentaire de protection lorsque la période qui s’est écoulée entre le dépôt de la demande de brevet de base et la date de la première autorisation du mise sur le marché est inférieure à cinq ans » mais qu’elle devait être complétée par celle de la détermination du point de départ de la prorogation de la durée de protection pour proposer des CCP à durée négative.