La CJUE est saisie de plusieurs questions préjudicielles posées par les juridictions et autorités britanniques qui ont à connaitre du contentieux des CCP à multiples principes actifs.
Successivement, les 10 et 11 mai 2011, la Cour de Cassation et la Cour de Paris ont ordonné le sursis à statuer dans deux affaires où il est question de CCP à multiples principes actifs mais dans des termes différents .
- Indiquons simplement le moyen au pourvoi de la société société Daiichi Sankyo company limited contre l’arrêt de la Cour de Paris qui a rejeté son recours contre la décision de rejet de l’INPI :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 2009) que la société Daiichi Sankyo company limited a déposé le 12 juin 2006 auprès de l’Institut national de la propriété industrielle une demande de certificat complémentaire de protection (CCP) no 06C0019, fondée sur le brevet européen déposé le 21 février 1992, délivré le 25 avril 2001, publié sous le no EP 0 503 785 intitulé “dérivés de 1- biphénylimidazole, leur préparation et leur
utilisation thérapeutique” avec une autorisation de mise sur le marché octroyée en France le 8 février 2006 sous le no CIS 66838901 pour une spécialité pharmaceutique ayant pour principes actifs l’olmésartan médoxomil et l’hydrochlorothiazide ; que le directeur général de l’INPI a rejeté cette demande ;Attendu que la société Daiichi Sankyo company limited fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté son recours en annulation de la décision du directeur général de l’INPI ayant rejeté sa demande no 06C0019, alors, selon le moyen :
- 1/ qu’au sens des articles 1 c) et 3 a) du règlement CEE no1768/92 du 18 juin 1992, le produit « protégé par un brevet de base » est le produit qui entre dans le champ de la protection du brevet ; qu’une association de deux principes actifs est « protégée par le brevet » au sens de ces articles dès lors qu’elle est couverte d’une manière ou d’une autre par le brevet ; qu’en exigeant que la composition de principes actifs pour laquelle le CCP est demandé soit « revendiquée en tant que telle » dans le brevet, cependant qu’il lui appartenait seulement de rechercher, notamment au regard de la description du brevet, si cette composition ayant pour objet un médicament destiné au «traitement de l’hypertension artérielle essentielle» entrait dans le champ du brevet no 0 503 785, qui vise précisément à protéger une série de composés « aux activités hypotensives intéressantes et qui peuvent être utilisés dans le traitement et la prophylaxie de l’hypertension », la cour d’appel a violé les articles 1 et 3 du règlement CEE no1768/92 précité ;
- 2/ qu’au sens des articles 1 à 4 du règlement CEE no1768/92 du 18 juin 1992, le CCP est accordé pour un « médicament », c’est-à-dire pour « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou animales, ainsi que toute substance ou composition pouvant être administrée à l’homme ou à l’animal en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier des fonctions organiques chez l’homme ou l’animal » ; qu’en retenant que l’olmésartan médoxomil avait déjà fait l’objet d’une AMM n° NL 28292 du 6 août 2003 et d’un CCP no 03C0037 délivré le 11 février 2005 sur la base du brevet n°0 503 785, cependant que le médicament visé par cette AMM et ce CCP n’avait pour principe actif que l’olmésartan médoxomil et était couvert par les revendications 1 à 4 du brevet, tandis que le médicament objet de l’AMM n° CIS 66838901 avait pour principe actif une composition d’olmésartan médoxomil et d’hydrochlorothiazide et était couvert par la revendication 5 du brevet, de sorte qu’il ne s’agissait pas du même « médicament », la cour d’appel a statué par un motif inopérant, en violation des articles 1 à 4 du règlement précité ;
Ce sursis est prononcé dans l’attente des questions préjudicielles des (affaire C- 6/11) et 24 juin 2010 (affaire C- 322/10) du tribunal des brevets d’Angleterre et du Pays de Galles ;
2. Le second sursis est intervenu dans une affaire où la société MEDEVA demandait à la Cour de Paris de surseoir dans l’attente de la décision de la CJUE mais également dans l’attente de l’arrêt de la Cour de Cassation sur le pourvoi de la société Daiichi Sankyo company limited qui est finalement intervenu la veille.
Considérant que la demande mentionne en l’espèce le brevet de base européen n° 04 018 329, déposé le 26 avril 1990, publié sous le n° 1 666 057 et délivré le 18 février 2009, sous le titre Procédé de production d’un vaccin acellulaire contenant des antigènes de Bordetella pertussis et fait référence à une Autorisation de Mise sur le Marché octroyée en France le 14 octobre 2002 sous le n° NL 27553 pour une spécialité pharmaceutique ayant comme principes actifs l’association de :
– l’anatoxine diphtérique
– l’anatoxine tétanique
– l’anatoxine pertussique
– la pertactine
– l’hémagglutinine filamenteuse
– agglutinogènes pertussiques 2+3 fimbrae
– le virus poliomyelictique inactivé de types 1,2 et 3;Considérant que le directeur général de l’INPI, après avoir énoncé qu’une composition de principes actifs visée dans l’AMM peut faire l’objet d’un CCP à condition d’être protégée par le brevet de base, ce qui suppose qu’elle soit revendiquée en tant que telle, a rejeté la demande au motif que la composition visée dans l’AMM n’est pas protégée au sens des dispositions de l’article 3)a du règlement précité par le brevet de base qui ne revendique pas les deux principes actifs que sont les agglutinogènes pertussiques 2+ 3 fimbrae et le virus poliomyelictique inactivé de types 1,2 et 3;
On notera la motivation de la Cour pour prononcer le sursis :
Considérant qu’il est constant que le débat met en cause l’interprétation qu’il convient de donner à l’article 3a) du règlement (CE) n° 469/2009 du 6 mai 2009 dans le cas particulier des vaccins multivalents , interprétation dont est actuellement saisie la CJUE par le biais d’une question préjudicielle d’une juridiction britannique appelée à se prononcer dans les mêmes circonstances que la cour de céans sur le refus opposé à la société MEDEVA BV par l’autorité administrative compétente d’octroyer un CCP sur la base du même brevet ;
Considérant qu’il est tout aussi constant que la Cour de cassation est saisie d’un pourvoi contre une décision du 6 novembre 2009 par laquelle la cour de céans a retenu l’interprétation du directeur général de l’INPI et a rejeté comme dénué de pertinence le moyen tiré du ‘test de contrefaçon ‘;Considérant qu’il échet, pour une bonne administration de la justice, de faire droit à la demande de sursis à statuer dans l’attente des décisions respectives de la CJUE et de la Cour de cassation ;