La contrefaçon par équivalence est quelque fois invoquée, mais son action est difficile à faire reconnaitre.Dans l’affaire jugée par la Cour de Paris le 13 février 2015, deux brevets étaient opposées, l’un est annulé, la demande en contrefaçon de l’autre est rejetée.
C’est la motivation du rejet de l’action en contrefaçon par équivalence qui retient l’attention.
- Le brevet porte sur un système de réglage en hauteur de la table des pupitres scolaires.
Le but de l’invention est de fournir un dispositif de verrouillage et de blocage en position verrouillée, pour monter les tubes coulissant l’un dans l’autre, s’adaptant à toutes les formes de tube, facilement montable et ne déformant pas les tubes lors du blocage, de préférence en évitant de faire des saillies sur l’extérieur et éliminer tout danger lorsqu’une personne heurte le tube.
L’invention consiste à proposer un dispositif de tubes montés , présentant des perçages radiaux diamétralement opposés, de telle sorte que des perçages du tube intérieur se situent face à des perçages du tube dans les positions relatives à des tubes dans lesquelles le verrouillage est souhaité.
A cet effet, le dispositif comporte un boîtier monté dans le tube intérieur et présentant un logement traversant de part en part au niveau du perçage du tube intérieur, le logement présentant une zone munie d’un taraudage, un embout monté coulissant dans le logement du boîtier, un ressort prenant appui sur une paroi intérieure du boîtier et d’autre part sur l’embout et poussant l’embout radialement vers l’extérieur des tubes et une vis en prise avec le taraudage du logement du boîtier et pouvant venir en appui sur l’embout.
La partie descriptive du brevet présente ensuite le rôle technique joué par chacun de ces éléments, indiquant que l’embout bloquant les deux tubes l’un par rapport à l’autre assure la fonction de goupille, que le ressort exerce sur l’embout une force de telle sorte qu’une simple pression sur l’embout à l’encontre de la force du ressort permet le déverrouillage des deux tubes, et qu’enfin la vis permet de bloquer le dispositif en position verrouillée.
Le brevet comporte 6 revendications dont seules sont opposées les revendications 1, 2 et 6.
Revendication 1
Dispositif de verrouillage et de blocage en position verrouillée pour deux Tubes (1,2) montés coulissant l’un dans l’autre, et présentant des perçages radiaux (3,4) diamétralement opposés, de telle sorte que des perçages (4) du tube intérieur (2) fassent face à des perçages (3) du tube extérieur (1) dont les positions relatives des tubes dans lesquelles le verrouillage est souhaité caractérisé en ce qu’il comporte : un boîtier (5) monté dans le tube intérieur (4) et présentant un logement le traversant de part en part au niveau d’un perçage (4) du tube intérieur (2), le logement présentant une zone muni d’un taraudage, un embout (7) monté coulissant dans le logement du boîtier, et dont une extrémité (9) peut passer à travers les perçages (4,3) des tubes intérieur (2) et extérieur (1), sans toutefois que l’embout (7) puisse traverser ces perçages, un ressort (10) prenant appui, d’une part, sur une paroi intérieure du boîtier et, d’autre part, sur l’embout (7) et poussant l’embout (7) radialement vers l’extérieur des tubes et, une vis (11) en prise avec le taraudage du logement du boîtier et pouvant venir en appui sur l’embout (7).
- La contrefaçon littérale est rejetée.
..s’il ressort de la description effectuée par l’huissier instrumentaire que le dispositif litigieux comporte un boîtier monté dans un tube intérieur, comportant un logement le traversant de part en part, présentant une zone munie d’un taraudage dans laquelle est logé un écrou disposé transversalement au logement, cette description fait cependant apparaître que l’embout n’est pas monté comme dans la revendication 1 du brevet opposé, coulissant dans le logement du boîtier, mais est situé à l’extérieur de ce dernier et est monté en rotation car il est fixé à l’extrémité d’une lame à ressort qui dépasse du boîtier.
De plus, la lame du ressort du dispositif litigieux ne prend pas appui comme dans la n° 1 du brevet sur une paroi intérieure du boîtier et sur l’embout car elle est fixée par une de ses extrémités à la surface extérieure du boîtier au moyen d’une vis. La contestation de la société …sur ce point difficilement compréhensible et fondée sur les annexes de sa pièce 10 n’est pas de nature à contredire ce positionnement de la lame, alors que l’embout est clairement à l’extérieur du boîtier.
Par ailleurs, le ressort pousse l’ergot auquel il est fixé à son autre extrémité suivant un mouvement de rotation et non pas radialement comme dans la revendication 1 et sa vis ne vient pas en appui sur l’embout car le ressort se trouve entre l’embout et la vis.
Il s’ensuit que quatre des caractéristiques de la revendication 1 ne sont pas reproduites.
- Sur la demande en contrefaçon par équivalence.
..fait valoir à cet effet que la fonction de l’embout qui est de verrouiller le tube intérieur et extérieur pour régler la hauteur de la table, est reprise. Elle poursuit en indiquant que les fonctions des quatre éléments de l’invention : embout, lame élastiquement déformable, vis du dispositif de verrouillage et de blocage et boîtier sont reproduits alors que ces deux derniers n’étaient pas connues au moment du dépôt de son brevet.
L’identité de fonction des moyens nécessite que les quatre moyens en combinaison produisent le même effet technique premier objet de l’invention et que cette fonction soit nouvelle.
Cependant, cette fonction de l’embout est déjà divulguée par le brevet Simire n° 78 31 758 dans lequel l’embout ou ergot 9 assure le blocage et le verrouillage des tubes, de sorte que la revendication 1 ne protège que la structure : embout coulissant dans le logement et non cette fonction.
La vis dans ce même brevet ou tige 13 a pour fonction d’assurer le déplacement en translation de l’écrou et, par l’intermédiaire de l’écrou bloque à l’issue de son vissage, l’ergot 9 dans sa position verrouillée.
La fonction de poussée du ressort dans le trou des tubes de l’embout est déjà divulguée dans la figure 3 du brevet DE 2806319.
Il en ressort que comme jugé avec pertinence par le tribunal les éléments invoqués par la société … au soutient que l’action en contrefaçon par équivalence ont chacun une fonction déjà connue de l’art antérieur et que ces éléments ne peuvent donc être protégés dans leur fonction mais uniquement dans leur forme qui n’est pas reproduite comme analysée ci-dessus.
C’est donc à bon droit que le tribunal a rejeté l’action en contrefaçon de ce brevet.