L’arrêt de la Cour de Bordeaux du 5 septembre 2013 examine une demande en rétractation d’une ordonnance ayant autorisé une saisie-contrefaçon mais cette demande est présentée trois ans après.
29 juillet 2008 : ordonnance du Président du TGI de Libourne autorisant la saisie-contrefaçon au regard d’un brevet française relatif à une machine destinée à enfouir des plantes ou des piquets
29 et 30 juillet 2008 : saisie-contrefaçon dans les locaux de la société S….. à Pomérol et dans d’autres locaux situés dans le ressort du TGI de Bordeaux.
8 mars 2011 : le TGI de Bordeaux prononce des mesures d’interdiction et indemnitaires pour contrefaçon du brevet et ordonne une expertise sur la détermination du préjudice.
Appel du Jugement du 8 mars 2011.
13 mars 2011 : assignation « comme en matière de référé » devant le TGI de Libourne en rétractation de l’ordonnance du requête du 29 juillet 2008.
24 mai 2012 : le Président du TGI de Libourne « en la forme des référés » déboute le demandeur à la rétractation.
15 juin 2012 : appel de cette ordonnance.
5 septembre 2013 : la Cour de Bordeaux rétracte l’ordonnance du 29 juillet 2008.
- Sur l’incompétence territoriale du juge de Libourne à autoriser la saisie- contrefaçon
En vertu des dispositions des articles L 615 -5, R 615 -2 D 631-2 du Code de la Propriété intellectuelle, applicable en la matière au jour de la saisine du président du tribunal de grande instance de Libourne , la saisie descriptive ou réelle ne peut être ordonnée que par le Président d’un des tribunaux de grande instance mentionnées à l’article D.631-2 dans le ressort auquel les opérations doivent être effectuées, soit en application du tableau VI annexé au Code de l’Organisation Judiciaire, le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux.
En l’espèce la propriété de la S…….., lieu de la saisie contrefaçon sollicitée, étant située dans le ressort du Tribunal de Grande Instance de Libourne, c’est-à-dire dans le ressort de la Cour d’Appel de Bordeaux, seul le Président du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux était compétent avant tout procès pour autoriser une saisie contrefaçon au siège de cette propriété en application de l’article R615-2 du Code de la Propriété Intellectuelle.
Le Président du Tribunal de Grande Instance de Libourne était donc incompétent, cette juridiction ne figurant pas parmi les juridictions spécialisées fixées par le tableau VI du Code de l’Organisation Judiciaire, ainsi l’ordonnance qu’il a rendue le 29 juillet 2008 est de ce fait entachée de nullité.
- Sur la possibilité d’engager cette instance en rétractation après un premier jugement de condamnation
Comme le soutiennent les intimés pour s’opposer à la rétractation de l’ordonnance litigieuse, le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux saisi au fond par assignation du 12 août 2008 en raison de sa compétence exclusive pour connaître d’un tel contentieux, a, par jugement en date du 8 mars 2011, rejeté la contestation de la compétence du tribunal de grande instance de Libourne et a dit dans son dispositif que les saisies contrefaçons avaient été opérées de manière régulière.
Cependant, si contrairement à ce que soutient l’appelant, cette décision a autorité de la chose jugée dès son prononcé, nonobstant appel, et ce jusqu’à ce que la cour saisie de l’appel ait statué, il n’en reste pas moins que seul le président du tribunal de grande instance de Libourne est compétent pour statuer sur la validité de l’ordonnance sur requête qu’il a lui même rendue, autorisant la saisie contrefaçon, et ce à l’exclusion du juge saisi de la procédure au fond.
En conséquence il y a lieu de prononcer la rétractation de l’ordonnance du 29 juillet 2008 rendue par le président du tribunal de grande instance de Libourne alors qu’il n’était pas compétent pour statuer sur la requête présentée.
La décision déférée sera donc infirmée.
Merci. Maître
Heureux de vous relire
Apparemment, la rétractation prime sur l’annulation et ne peut être purgée d’un vice par une décision au fond de première instance… et il n’y pas de délai pour le faire !
Bien sur si la décision au fond passe avant en force de chose jugée, ce n’est plus très intéressant… sauf si la saisie peut être utilisée dans une autre affaire