L’action en contrefaçon peut être engagée sur la base d’un brevet français. Que devient cette instance quand la demande de brevet européenne est également invoquée ? L’appel d’une ordonnance du Juge de la Mise en Etat qui ordonne le sursis à statuer est–il possible ?L’ordonnance du Premier Président de la Cour de Paris du 13 juin 2013 illustre ces problématiques.
Mavic est titulaire :
– du brevet français n°06 04237 concernant une roue à rayons, déposé le 12 mai 2006 et publié le 13 mars 2009 sous le n° 2 900 869,
– de la demande de brevet européen n°2 311 649 déposée comme demande divisionnaire de la demande de brevet européen n°2 021189 publiée le 29 novembre 2007.
- 2 août 2012 : MAVIC assigne CORIMA devant le TGI de Paris en contrefaçon des revendications 1, 2, 9, 10,15, 23, 24, 25 et 26 du brevet français n°06 04237 et des revendications 1 à 9 et 11 à 16 de la demande de brevet européen n°2 311 649;
- 1er mars 2013 : le Juge de la Mise en Etat ordonne sur la demande de CORIMA le sursis à statuer sur l’action en contrefaçon tant de la demande de brevet européen n°2 311 649, de droit, que du brevet français n°06 0423 7, dans un souci de bonne administration de la justice;
- MAVIC fait appel;
- Le 13 juin 2013, le 1er Président de la Cour de Paris « déboute » MAVIC :
Considérant que la société MAVIC invoque, au titre du motif grave et légitime, justifiant l’autorisation d’interjeter appel de la décision de sursis à statuer sur l’action en contrefaçon du brevet français, «dans le souci d’une bonne administration de la justice», l’acquisition par la société CORIMA, de parts de marchés et le gain de notoriété «en utilisant la technologique que la société MAVIC estime être la sienne», ce qui lui causerait un préjudice irrémédiable eu égard à la lenteur de la procédure devant la l’Office Européen des Brevets (OEB) ;
Considérant, cependant, que la société MAVIC, qui évoque des délais de procédure à l’OEB de l’ordre de «deux ans voire plus», tout en indiquant qu’elle pourrait demander un traitement accéléré de la procédure d’examen, auquel cas la délivrance du brevet européen, jusqu’à laquelle le juge de la mise en état a sursis à statuer sur l’action en contrefaçon du brevet français, pourrait intervenir «pas avant au moins un an», c’est-à-dire dans un délai de l’ordre d’un an, ne démontre pas que cette échéance est particulièrement lointaine, et qu’elle ne répond pas aux impératifs d’un délai raisonnable, étant relevé, par ailleurs, qu’elle ne saurait préjuger de l’issue d’une procédure de référé en cessation des agissements prétendument contrefaisants, non plus que d’une procédure au fond, rien ne l’autorisant en l’état à présumer que la société CORIMA fait usage d’une technologie sur laquelle elle dispose, seule, des droits revendiqués ;
Que l’existence d’un motif grave et légitime justifiant d’autoriser l’appel contre la décision de sursis à statuer n’est pas démontrée ; que la demande sera par conséquent, rejetée.
A noter que MAVIC soutenait:
– que l’argument selon lequel elle pourrait agir devant le juge des référés, juge de l’évidence, n’est pas sérieux, alors que le juge du fond a déjà jugé que « les modifications éventuellement imposées (aux revendications de la demande de brevet européen) auront une incidence certaine, tant sur la question de la validité que sur la contrefaçon alléguée (du brevet français),
– que c’est donc cette appréciation du juge du fond qu’il y a urgence à déférer à la Cour, car c’est bien d’elle que dépend la poursuite de la procédure en contrefaçon du brevet français, que ce soit au fond ou en référé,