Les capacités de l’homme du métier doivent-elles être appréciées comme les capacités intellectuelles et les connaissances qu’une seule personne peut maîtriser ou bien celles que plusieurs personnes peuvent connaître et combiner entres elles ?L’arrêt de la Cour de Paris du 20 mars 2015 relancera-t-il le débat ?
- La définition de l’homme du métier intervient lors de la discussion sur l’insuffisance de description de la revendication 1ère
La revendication n°1 est donc ainsi rédigée :
« Train d’atterrissage pour hélicoptère, comprenant deux patins (P) présentant chacun une plage longitudinale d’appui au sol (1) et reliés à une traverse avant et à une traverse arrière (2) elles -mêmes assujetties à la structure de l’appareil par des organes de liaison (4, 6), la traverse arrière (2) étant fixée par les extrémités de ses branches descendantes (2a) à la partie arrière des dites plages longitudinales d’appui (1), caractérisé en ce que chacun des dits patins (P) présente à l’avant une zone de transition inclinée (T) à double courbure (Cl, C2) s’orientant transversalement auxdites plages longitudinales d’appui au sol, au-dessus du plan de ces dernières, les deux zones de transition constituant ensemble, de la sorte, une traverse avant intégrée, décalée par rapport à la délimitation avant du plan de contact des plages longitudinales d’appui des patins sur le sol « .
- Le rappel des dispositions légales
Aux termes de l’article L 613 -25 du Code de la propriété intellectuelle, le brevet est nul s’il n’expose pas l’invention de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter.
- L’homme du métier entendu comme une équipe d’ingénieurs et sa capacité de réalisation de l’invention
L’homme du métier en l’espèce, se définit comme une équipe d’ingénieurs en construction mécanique spécialisée dans le développement de trains d’atterrissage pour hélicoptère ayant des compétences en structure de matériaux et phénomènes vibratoires.
Les sociétés intimées soutiennent que la revendication 1 du brevet dont s’agit doit être considérée comme spéculative ne permettant pas à l’homme du métier de mettre en oeuvre l’invention, L’inclinaison vers l’avant ou l’arrière de la traverse avant est insuffisamment décrite dans son degré, ou son rayon de courbure, car l’avantage promis relève de la pure spéculation et aucune indication n’est donnée à l’homme du métier pour lui permettre d’obtenir les avantages promis, notamment avec l’inclinaison arrière, les réductions invoquées (masse, coût, ..) dépendant de trop de paramètres: composition, coûts, poids comportement des matériaux, forme donnée, type d’assemblage ou répartition des matériaux entre eux.
Cependant, le brevet explique clairement quels sont les avantages de l’invention et les sociétés intimées affirment sans le démontrer que l’homme du métier serait dans l’incapacité de reproduire l’invention, le fait qu’au Canada les revendications qui portent sur une traverse avant décalée vers l’arrière aient été annulées au motif que le déposant ne justifiait pas avoir testé ces modes de réalisation à la date du dépôt est sans incidence sur l’appréciation en France de la validité du brevet.
Or, la description du brevet explique en détail comment réaliser une traverse avant décalée vers l’avant et vers l’arrière en présentant également le matériau pouvant être utilisé, ses limites d’élasticité et des détails de réalisation précis et les figures 1 et 11-e du brevet présentent un train d’atterrissage conforme à chacun des modes de réalisation des revendications de sorte que l’homme du métier, avec l’aide de ses connaissances, par des opérations matérielles ne revêtant pas de difficultés excessives est en mesure de reproduire l’invention.
Par ailleurs les figures 12 et 13 illustrent les déformations du train d’atterrissage en cas d’atterrissage illustrant le comportement dynamique particulier de ce train d’atterrissage qui ne sont pas contestées par des documents techniques contraires et les objectifs chiffrés, de nature indicative, dont il n’est pas démontré par les sociétés intimées qu’ils soient erronés alors qu’au contraire la société Airbus Helicopter démontre qu’ils sont atteints sur ses appareils AS 350 et EC 130 alors au surplus que la preuve de ces chiffres n’a pas d’incidence sur la validité du brevet qui peut être aisément reproduit par l’homme du métier.
C’est donc à bon droit que le tribunal a rejeté ce moyen de nullité.